Elles me font rire nos chansons d'amour en Occident.
Ne vous méprenez pas, il y a l'excellent "You've got the love" de Florence and the Machine, le "Ne me quitte pas de Jacques Brel, "Les histoires d'A" des Rita...
J'en écoute pleins et à la pelle.
Mais récemment, je crois que j'ai écouté la chanson de trop; celle du -très bon- Bruno Mars, "Grenade".
http://www.youtube.com/watch?v=tkuoRGig4Cs
Le garçon chante vraiment bien.
Mais quand on y pense un brin (et qu'on parle la langue de Shakespeare), voilà ce que le bonhomme raconte:
"Tout ce que je t'ai demandé, c'est tout ton amour,
Ce que tu ne comprends pas c'est que j'attraperais une grenade pour toi,
Je mettrais ma main dans une lame pour toi,
Je me jetterais sous un train pour toi,
Tu sais que je ferais tout pour toi..."
Alors OK, bon, là moi, j'ai comme un doute.
Déjà l'amour ne se quantifie pas.
Donc demander à la meuf TOUT son amour signifie juste, "Ouais, tu m'aimes, alors ton amour pour l'Art, le Beau, les Droits de l'Homme, les bébés chiens et les moules à l'ail, t'oublies, parce que maintenant t'es à moi".
Sérieux?
T'es pas un peu taliban, là, bonhomme???
En outre, franchement, t'es certain de toi, là, je veux dire, dans quelle espèce de fichue circonstance aurais-tu, dans ta vraie vie, à attraper une grenade ou transpercer ta main d'une lame, ou te jeter SOUS UN FOUTU TRAIN, que diable?
Mais je suis sûre que ta dulcinée ne te demanderais jamais un truc pareil, parce que je ne sais pas, je suis peut-être naive, hein, mais franchement, un manchot, démembré à la gueule cassée, çà n'a rien de sexy.
Parce que personne de sensé et d'amoureux ne demande à son élu(e) de s'auto-mutiler pour faire ses preuves, je me trompe???
Et quand bien même, ce serait un stupide pari, ou un truc de défi extérieur, où un truc de "Soit tu fais çà, soit tu meurs", bien, par définition, çà n'arrive pas dans la vraie vie.
Au-delà de çà, je ne peux m'empêcher de constater l'emploi du conditionnel.
Comme dans "hypothèse".
Donc, bonhomme, laisse-moi douter de ta bonne foi.
Si vraiment, tu étais comme àç, paf, au pied du mur, à devoir faire tes preuves, avec ton petit blouson de cuir, ta voix rocailleuse et ton p'tit trillby, ben, laisse-moi douter de tes capacités à te trasher la main par amour.
Et puis personne ne te le demandes, alors arrête.
Ta chanson est belle, mais elle me fait penser à ces (souvent américains) touristes qui parlent de Paris en disant: "Oh, je connais la MEILLEURE boulangerie de la ville".
Mais, c'est complètement utopique et subjectif et impossible, çà, non?
Le meilleur.
En ce mois de la Saint-Valentin et de célébration de l'amour (enfin, pour ma part, je célèbre l'Amour tous les jours et à chaque minute, mais c'est encore un autre débat), posons-nous cette question:
" L'amour, c'est vraiment se faire péter une grenade à la gueule?"
Ou encore:
"Cher Occident, tu es sûr que t'as pas craqué ton string, là?"
L'amour est simple, droit, tout doux, ne demande aucun effort, des concessions, parfois, oui, mais tranquillou, bilou.
L'amour te fais sortir le meilleur de toi, amour de ton prochain, de ce que tu fais, d'une cause, amour du pain, amour pas vain, l'amour n'est pas court, il surgit dans le métro, amour du quotidien, amour, amour.
L'amour n'est pas se faire péter une grenade dans la gueule, Occident, l'amour est libre, l'amour est Liberté, l'amour est éternel.
L'amour, cher Occident, cher Bruno Mars, ce n'est pas une grenade.