mardi 21 décembre 2010

Faites le mur.




Faites le mur, réalisé par Banksy, est actuellement en salles. Courrez-y.

http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=178192.html


Je suis fille de restauratrice de tableaux, et j’ai eu des préjugés sur le monde de l’art contemporain pendant longtemps.
Et puis on m’a fait découvrir Banksy et j’ai recu ma copie.
Banksy est un street-artiste britannique, qui s’est fait repéré en accrochant ses propres toiles à la Tate: il avait représenté la Joconde portant un masque à gaz, ou un chevalier du XVII siècle buvant un Coca, et les avait accrochées, tout simplement, entre les oeuvres d’art de cette séculaire institution qu’est la Tate.
Après, il a poursuivi ses facéties artistiques en allant graffer sur sur mur séparant Israel de la Palestine des images de plages ensoleillées (çà lui a valu de se faire traiter de «terroriste de l’art»), ou encore dans les rues de Londres, il s’est amusé à bricoler une cabine téléphonique pour faire comme si celle-ci avait été éventrée.
C’est un artiste drôle, qui insuffle à l’art contemporain une bonne dose d’humour et de politique aussi, tout ce que l’art devrait faire.
Alors, quand ses oeuvres ont commencé à vraiment s’arracher à prix d’or sur le marché de l’art, Banksy, probablement énervé de perdre sa crédibilité de la rue s’est mis bille en tête de sortir un documentaire.
Parce qui déconne avec l’art contemporain, ce n’est pas tellement l’art en lui-même, c’est plutôt l’existence d’un marché de l’art, qui pervertit pas mal la donne.
Quand on pense que le «Golden Veal» de Damian Hisrt est devenue l’oeuvre la plus chère vendue sur le marché de l’art le jour même où la crise économique la plus grave de l’Histoire débutait, on se dit que ce monde ne tourne parfois pas rond.
Alors que le propose de Banksy, c’est justement de démocratiser l’art, en le mettant dans la rue, en le rendant éphémère, également...
Cet excellent documentaire, ou plutôt mocumentaire (on a du mal à se dire que ce n’est pas un fake) réunit toute cette jeune génération de street-artists qui sont sérieusement en train de changer la donne: Obey Giant (responsable des affiches de campagne de Barack Obama), André, Space Invaders... Ne manque que JR, le talentueux jeune nouveaux qui affiche partout des visages des habitants d’une des favelas les plus pauvres du  Brésil sur les murs de celle-ci, afin de l’humaniser.
Bref, le documentaire débute avec Banksy (comme les Daft Punk, il ne sort jamais démasqué, ce qui est politique à l’époque de Facebook...), Banksy, donc qui annonce face caméra, avec une voix truquée qu’un homme étrange l’a contacté pour faire un documentaire sur l’art de rue et toute sa clique, mais que cet excentrique était tellement intrigant, qu’en fait le documentaire est sur lui.
On part donc sur une trame classique, ou presque, de doc, où l’on nous présente ce français qui prend des vidéos de manière compulsive. Tout le petit monde du street-art est rassemblé autour de ce soi-disant cinéaste compulsif, qui devient par la suite Mister Brain Wash, du fait du soutien de ces artistes chevronnés l’encourageant à devenir artiste lui-même.
Et c’est en çà qu’on ne peut s’empêcher de penser à une facétie, un pied-de-nez de Banksy; le marché de l’art, sans même avoir vu les oeuvres du mystérieux MBW, se met à spéculer follement autour de sa cote.
Je laisse au spectateur la surprise d’aller découvrir ce film drôle au cinéma, il est actuellement en salle, et il en dit énormément sur notre société.
Sachez aussi que tous ces street-artists continuent de s’exposer dans la rue, à Belleville, Londres, New-York... C’est ainsi qu’ils se sont tous fait connaître et qu’ils continuent tous de travailler (même si leurs oeuvres s’arrachent des millions en galerie), ils continuent d’aller poser un pochoir, une affiche, aux quatre coins des murs des villes de la planète.
Citadins du monde, ouvrez les yeux, l’Art vous regarde, partout. 
Faites le mur.